La Navette du Tisserand

Mes jours s'en vont plus vite qu'une navette du tisserand (Job 7:6).

Pendant beaucoup d'années, j'ai côtoyé plusieurs sœurs qui étaient des tisserandes. Elles ont travaillé toute leur vie dans les grandes usines textiles du Lancashire, tissant toutes sortes d'étoffes. Toutes d'entre elles souffraient de problèmes d'audition dus au bruit des machines industrielles à tisser. Dans les années 1980, lors d'une formation intensive pour un nouveau poste dans mon entreprise, j'ai eu l'occasion de travailler dans une usine textile du Nottinghamshire. J'ai alors été témoin du bruit assourdissant qui emplissait les vastes ateliers de tissage. Les ouvriers lisaient sur les lèvres pour communiquer, car ils ne pouvaient pas s'entendre. L'autre impression marquante qui m'est restée est la vitesse des machines à tisser. L'usine illustrait l'industrialisation de l'un des plus anciens métiers du monde, et elle était encore caractérisée par la rapidité de la navette du tisserand.

Job utilise la rotation rapide de la navette du tisserand pour illustrer la rapidité avec laquelle les jours de sa vie s'écoulent. En vieillissant, nous comprenons mieux le sens des paroles de Job, car nous avons l'impression que le temps file à toute allure. Bien sûr, le temps ne raccourcit pas, mais notre perception du temps qui passe, souvent influencée par les regrets, les déceptions et les échecs, nous donne cette impression. Job traversait une période très éprouvante et aspirait à être soulagé de ses souffrances considérables. Il sentait que sa vie, autrefois si fructueuse, sombrait rapidement dans le malheur et la tristesse.

Le tissage à la main demeure un art précieux et rare, permettant de produire certains des plus beaux tissus au monde. Job a dû apprendre que tout dans sa vie se déroulait au rythme de Dieu, selon sa volonté et pour sa gloire. La vie de Job était tissée par Dieu. Dieu a intégré la douleur et le chagrin de Job à une existence qui lui était si précieuse. Dieu a demandé à Satan : « As-tu considéré mon serviteur Job, qu'il n’y a sur la terre aucun homme comme lui, parfait et droit, craignant Dieu, et se retirant du mal ? » (Job 1:8). Lorsque Satan a cherché à détruire Job, Dieu n'a pas cessé de tisser une vie qui serait plus fructueuse à la fin qu’au début. « Job vécut cent quarante ans, et il vit ses fils, et les fils de ses fils, quatre générations. Et Job mourut vieux et rassasié de jours » (Job 42:16-17).

Au milieu de toutes ses souffrances, Job était abattu et s’attendait à ce que la navette du tisserand s’arrête brusquement et mette fin à sa misère. Mais le livre de Job ne s’achève pas sur l’inquiétude de Job face au temps qui passe. Il se termine sur la profonde compréhension qu’a Job de l’œuvre de Dieu dans sa vie. Il dit à Dieu : « Mon oreille avait entendu parler de toi, maintenant mon œil t’a vu » (Job 42:5).

Il est passé d'entendre le bruit de la navette du tisserand à voir le Tisserand. Cette expérience l’a conduit à une confiance totale en Dieu. Il a fini ses jours en harmonie avec le cœur de Dieu, dans un ministère d’intercession et comme une bénédiction pour les générations futures. L’œuvre habile de Dieu dans sa vie était indéniable, et Job en a témoigné à travers les noms joyeux de ses trois belles filles : Jémima (Belle comme le jour), Ketsia (Un parfum) et Kéren-Happuc (Le rayon coloré). Lorsque la navette s’est arrêtée, la beauté de l’ouvrage achevé du Tisserand s’est révélée dans toute sa lumière, sa fraîcheur et ses couleurs.

Des siècles plus tard, Paul écrivait à l’Église de Philippes : « Étant assuré de ceci même, que celui qui a commencé en vous une bonne œuvre, l’achèvera jusqu’au jour de Jésus Christ » (Philippiens 1:6). Comme Job, l’apôtre avait appris à détourner son regard de la navette du Tisserand et à se reposer sur la sagesse du Tisserand. Que nous recevions la grâce d’en faire autant.

Gordon D Kell